Les vertus de l’Immaculée

Les vertus de l’Immaculée

Table des matières

  1. Sa vie spirituelle (écrit et audio)
  2. Sa Foi (écrit et audio)
  3. Son humilité (écrit et audio)
  4. Son esprit d’abandon (écrit et audio)
  5. Le silence de la Vierge (écrit et audio)

Sa vie spirituellevertus de Marie1

La vie intérieure des âmes contemplatives est toute simple parce qu’elle n’est faite que d’un seul acte perpétuellement renouvelé. Lumineux ou obscur, ce regard sur Dieu est aussi amour, adoration, don de soi. Les idées et les mots, s’ils servent parfois à le nourrir, ne peuvent en exprimer la richesse.

A vrai dire, l’acte de contemplation est intraduisible en notre langage. C’est un autre parler que celui des hommes, un parler d’esprit à Esprit.

La vie spirituelle de la Reine des contemplatifs échappe plus encore que toute autre à notre intelligence et à nos descriptions. Elle est trop simple et trop riche, tout à la fois. A vouloir exalter sa simplicité, nous l’appauvrissons, car nos simplicités ne sont qu’indigences. A détailler sa richesse, nous la compliquons, car nos richesses sont éparses. Il faudrait saisir d’un seul regard sa richesse dans sa simplicité. Et cela est impossible.

Si donc nous décomposons cette pure lumière au prisme de notre connaissance, nous l’abîmons en quelque sorte et les idées énoncées restent de lointaines approximations, si l’on peut associer ces deux termes. Elles décrivent moins la psychologie intérieure de la Vierge, que l’écho en notre psychologie de son mystérieux comportement.

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Sa Foi vertus de Marie2

Ceci entendu, c’est d’abord sa Foi qu’il convient de louer. Comme le lui disait Elisabeth, elle est bien « celle qui a cru », sans jamais hésiter en son cœur. A première vue, on pourrait se demander si elle a eu à vivre de foi. Ne touchait-elle pas du doigt les mystères de notre salut ? Elle a « pâti » l’Incarnation dans sa chair, vu de ses yeux le Fils de Dieu. Par ses larmes et ses déchirements, elle a coopéré d’une manière particulière à la Rédemption du monde. Certes. Mais vivant ces choses divines du dedans, plus que personne, elle s’est trouvée aux prises avec leur mystérieuse obscurité.

Dès l’Annonciation, sa raison est dépassée : « Comment cela se fera-t-il ? »
Inspirée par le Seigneur, elle a sans doute fait le vœu de garder sa virginité, en tout cas, elle « ne connaît point d’homme » et voici qu’on lui annonce d’En-Haut, une maternité future. Devant cette apparente contradiction de Dieu avec Dieu, la Vierge ne connaît qu’une attitude : celle de la foi. Elle adhère à la parole divine : « Qu’il me soit fait selon votre parole ». Et, par sa foi, comme Abraham, elle mérite l’accomplissement paradoxal de la promesse. Toujours vierge, elle devient mère.

Comblée soudain par la présence de ce petit être qui reçoit tout d’elle pour lui donner tout, inondée par la lumière du Verbe, Marie continue à vivre à l’ombre de la foi. Elle n’avait pas la vision béatifique. Comme nous, elle ne connaissait Dieu que par ses rayons réfléchis dans le miroir de la création, par les paroles qu’il avait adressées aux prophètes ou par les intuitions surnaturelles qu’il lui donnait.

Mais si la foi de la Vierge était de même nature que la nôtre, on la devine incomparablement plus claire. Nul obstacle ne s’était jamais opposé en son intelligence à l’envahissement de la lumière divine. Celle-ci la pénétrait de part en part, s’imposait à elle malgré son obscurité, avec la force et la sécurité d’une vision.

La naissance du Dieu fait homme, mystère de Foi

Le mystère n’en était pas « évacué » pour autant. La naissance de l’Enfant-Dieu a lieu aux hasards d’un recensement, dans la nuit, le froid, la pauvreté, le silence. Dieu se fait homme, l’Esprit lumineux, prompt et fervent s’unit à la chair lourde et obscure : son antagoniste. Il apparaît en ce qui le voile.

Comment la Vierge, au sein même d’une paix immense, n’aurait-elle pas éprouvé jusqu’au vertige, dans la nuit de Noël, tout ce que l’Incarnation a d’insondable ? Comment ne se serait-elle pas réfugiée dans sa foi immense et pure pour se tenir à la mesure du « don de Dieu » ?

La perte de Jésus au Temple et sa vie publique, mystères de Foi

C’est à la lumière de la foi qu’elle considérera toute l’existence de son Fils. « Ne comprenant pas » certaines choses, comme la démarche de l’Enfant au Temple, elle communiera aux raisons secrètes de Dieu qui les justifient.

La vie publique du Seigneur ne sera pas moins mystérieuse : et par certaines paroles du Christ, certains de ses gestes, et par l’endurcissement du grand nombre, l’échec grandissant de l’œuvre. Mais la foi de Marie, stimulée, pour ainsi dire, par les démentis que la réalité paraît lui opposer, ira sans cesse grandissante. Jusqu’à la fin, elle sera « celle qui croit » ; jusqu’au pied de la Croix.

La mort de Jésus en Croix, mystère de Foi

Ce « scandale de la croix », avec lequel les hommes se sont si lentement familiarisés, Marie en a subi le premier choc en un temps où les assurances extérieures manquaient. N’est-ce pas la loi de son existence de vivre les mystères de Dieu, presque toujours seule et en pointe de l’humanité ? Elle est celle qui fraie la route.

Comme le disait Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus : « elle n’a pas eu de Sainte Vierge à aimer !… C’est une telle douceur de plus pour nous, une telle douceur de moins pour elle !… »

Marie a dû croire, seule, aux paroles de Jésus : « Elevé de terre, j’attirerai tout à moi », alors qu’elle le voyait un objet de répulsion pour tous : « Tolle, Tolle ».

Elle a cru que s’accomplissait le salut du genre humain, au moment même où il se rendait coupable de déicide. Elle a cru que cette sanglante tragédie n’était que l’envers du trop grand amour du Père, livrant son propre Fils pour racheter ses enfants d’adoption… Elle a cru tout cela, en un moment où le monde, lui, se trouvait sauvé à son insu. La parole de Dieu, en cet instant, comme en toutes les grandes heures de son existence, a été son seul soutien, sa seule force.

Durant les longues années qu’il lui fallut encore demeurer sur terre, elle a vécu de cette parole conservée en son Cœur et sans cesse méditée. Son propre Fils, elle le demandait alors à un autre, au prêtre qui avait désormais pouvoir sur son Corps, et, elle le rencontrait dans l’invisible.


Son humilitévertus de Marie3

La Vierge Marie est celle qui a cru au mystère de Dieu, qui a vécu sous son obscur rayonnement. Du même coup, sans s’arrêter à se considérer elle-même, elle connaissait sa bassesse, pour employer sa propre expression. Connaissance de Dieu et connaissance de soi, c’est tout un.

Le sens aigu qu’elle a eu de sa petitesse de créature nous apparaît en proportion des lumières reçues sur Dieu. Et son humilité est empreinte d’un merveilleux équilibre. Parce qu’elle est vraie, la Vierge reconnaît sans détour tout ce que le Seigneur a fait pour elle : « Il a fait de grandes choses pour moi, le Puissant ».

Et elle évite d’instinct les formules exagérées qui naissent encore d’un orgueil secret. On ne l’entend pas déclarer « la plus indigne de toutes les créatures ». L’expression dont elle a usé par deux fois dans l’Evangile est plus mesurée, mais combien plus belle : « la petite servante du Seigneur ». Elle exprime à la fois le respect de la transcendance divine et le souci du service de Dieu. Ici encore, la Vierge a devancé la bonne nouvelle évangélique dont elle avait l’esprit : « Dites : nous sommes des serviteurs inutiles ».

C’est pourquoi son humilité se manifeste plus en actes qu’en paroles. La véritable humilité de consiste pas à dire beaucoup de mal de soi-même (on aime encore mieux en parler ainsi que de n’en rien dire), ni à courir après les humiliations retentissantes où l’on se recherche encore. Elle est dans l’effacement, l’oubli, et le fait de n’être compté pour rien, de ne vouloir être rien pour personne.

La Vierge Marie y a excellé. Elle s’est ensevelie dans une vie très ordinaire.

vertus de Marie4Sans doute, le meilleur de son existence était-il constitué par la prière, la méditation de l’Ecriture, l’accomplissement de ses devoirs religieux. Mais n’a-t-elle pas été accaparée aussi par les travaux domestiques les plus assujettissants ? Elle a entretenu son intérieur, préparé la nourriture des siens, elle est allée chercher l’eau à la fontaine. Ses propres mains ont pétri le pain et l’ont cuit. Les devoirs de la charité et de l’hospitalité sont venus s’ajouter aux obligations familiales ; elle n’hésitait pas à rendre service, la Visitation le prouve. Il lui a fallu aussi vêtir les siens : « Sa lampe ne s’éteint pas pendant la nuit, annonçait l’Ecriture. Elle met la main à la quenouille et ses doigts prennent le fuseau ».

C’est dans cette vie apparemment banale qu’une telle créature a moissonné pour Dieu une gloire impérissable, tant il est vrai que c’est l’amour seul qui compte. Etouffant en elle le désir de crier au monde cette bonne nouvelle qu’elle connaissait si bien, elle s’est tue, elle qui aurait si bien su parler de Dieu. Et, pour s’effacer, elle a déployé ces trésors d’ingéniosité que les hommes utilisent d’ordinaire à se mettre en lumière. Aussi, elle réussit à passer inaperçue du vivant de Jésus, et même après lui. On ne trouve pour ainsi dire pas trace de sa présence dans l’Eglise primitive, alors qu’elle en est l’âme.

Il faudra des siècles pour qu’elle consente à sortir de cette ombre et à apparaître dans le ciel de l’Eglise. Alors Dieu, pour prix de son amour de l’obscurité, la revêtira du soleil et la couronnera d’étoiles. Et toutes les générations diront bienheureuse celle qui, s’étant faite la plus petite, est devenue la plus grande dans le Royaume des Cieux.

L’humilité de l’Immaculée a été la cause de sa Maternité divine : « Quia ancillam humilem… » Le Père Maximilien Kolbe, juillet 1916


Son esprit d’abandonvertus de Marie5

Marie, dans la foi, voit l’invisible et perçoit sa « bassesse » en cette lumière ; comment ne se livrerait-elle pas à tous les vouloirs du Père ? L’abandon filial c’est, en quelque sorte toute sa vie spirituelle : « Ecce… fiat » ; n’a-t-elle pas traduit, elle-même, le mouvement de son âme en ces deux mots confiés à l’évangéliste ? Parfaitement disponible à l’égard de Dieu, elle semble lui dire à tout instant : « Ecce… me voici ». Elle lui livre jusqu’à la dernière fibre de son être pour que se fasse, en elle, Sa volonté : « Fiat ». De l’Annonciation à la Croix et à l’Assomption, elle est « oui », acquiescement total. Elle vit, jusqu’au plus intime, la demande du Pater en laquelle le Christ résume l’attitude du chrétien : « Que votre volonté soit faite ».

Avec Saint Joseph

Pour mieux se livrer à l’Amour, elle s’interdit mainte initiative qui n’est pas exigée par l’accomplissement de son devoir. Ainsi, lorsqu’elle devine l’angoisse de son fiancé, elle sait qu’il lui suffirait de dire un mot pour l’éclairer et lui rendre la paix. Ne devrait-elle pas intervenir ? Notre prudence humaine le suggère et s’étonne du silence de Marie. Mais elle est mesquine à côté de l’abandon héroïque pratiqué par cette âme. La Vierge Marie ne dira rien. Elle songera moins à « faire » la volonté de Dieu, qu’à la laisser « se faire » à travers elle, sans y mêler si peu que ce soit d’elle-même. Et poussant l’abandon jusqu’à ses limites extrêmes, elle laissera le Seigneur intervenir personnellement quand il le jugera bon.

Pendant la Passion

Au cours de la Passion, son renoncement sera plus parfait encore. Nous ne lisons pas qu’elle ait essuyé le visage de son Fils, comme l’a fait Véronique. Agir ainsi, c’eût été, ne fût-ce qu’un instant, cesser de se livrer à Dieu, de le laisser faire. Marie ne le pouvait, ni ne le voulait. Elle n’a même pas dit une parole au pied de la croix. Dieu ne lui a pas demandé, comme au jour de l’Annonciation, de prononcer des lèvres son Fiat. Il a préféré le voir inscrit dans son cœur, au tréfonds d’elle-même.

Comme de sa foi, cet abandon donne la mesure de l’amour de Marie pour Dieu. L’amour ne se borne pas à donner, ce serait trop peu ; il se donne lui-même, il se livre. En un sens, on ne peut plaire davantage à l’Aimé, qu’en s’abandonnant à sa discrétion. C’est lui éviter même ce léger ennui qu’on risque de lui causer en s’imposant.

Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus a si bien compris ces choses, dans son désir de s’offrir à l’Amour comme une sorte de jouet dont il pût disposer à son gré ! … Cette attitude est essentiellement évangélique. Si le Christ, au cours de sa vie apostolique, dit souvent : « Ma nourriture est de faire la volonté de mon Père… Je fais ce qui lui plaît », au point culminant de son existence, il insiste plus encore sur son abandon à l’égard du Père. Comme si sa propre volonté se désistait devant celle de son Père : « Pas ce que je veux, mais ce que tu veux ». Et le Père, demeurant en lui, y accomplissait ses œuvres, dans une absolue liberté.

L’abandon de Marie est aussi le secret de sa prière, une prière qui fut si simple. Elle ne « multipliait pas les paroles », en s’adressant à Dieu ou au Christ. On le voit bien à Cana où elle se contente de dire : « Ils n’ont plus de vin ». Eveiller sa foi, aviser le Seigneur, lui exposer ses propres nécessités et celles du monde, et puis, sans rien dire de plus, sans rien lui demander de particulier, lui faire confiance, le laisser agir selon son Cœur.

Au Cénaclevertus de Marie6

On aime à penser qu’au Cénacle, la Vierge a prié pour l’Eglise naissante avec la même confiance et la même simplicité, présentant, à son Dieu et à son Fils, les nécessités spirituelles des Apôtres : « Ils n’ont plus de vin ! » Elle demandait pour eux le vin de l’Esprit qui, en les enivrant d’une ardeur nouvelle, les lancerait à la conquête du monde…

Et au ciel, que fait-elle, sinon de montrer inlassablement au Christ les hommes avec toutes leurs misères et tous leurs besoins ? Sa confiance est telle qu’elle ne connaît pas l’hésitation. Ce qu’elle demande, Marie croit qu’elle l’a obtenu. A Cana, malgré la réponse évasive de son Fils, elle fait tout préparer par les serviteurs, sachant bien que son amour aura le dernier mot.

Il est difficile de cultiver l’abandon parfait, dans l’action comme dans la prière. A première vue, peut-être, une telle attitude paraît aisée, presque quiétiste. En fait, si elle ne se dément jamais, elle conduit à l’héroïsme et au dépouillement total, car toute l’action de Dieu à notre égard vise à nous arracher à nous-même et à tout. C’est parce que nous ne voulons pas perdre que nous refusons de nous laisser faire. Alors nous reprenons d’une main que nous avions laissé prendre dans l’autre.

Marie, au contraire, en s’abandonnant à la conduite de Dieu, a atteint le sommet du dépouillement. Non qu’elle ait eu, comme nous, à renoncer aux créatures, elle en fut toujours si profondément détachée ! Mais il lui a fallu au sein de son intimité avec Dieu, se détacher des propres biens de Dieu, se laisser reprendre le Fils qui lui avait été confié.

Jeune Mère, elle connut des joies inénarrables en tenant dans ses bras, le Fils de Dieu devenu son enfant à elle. Il semble qu’elle nous dise, toute épanouie, les yeux brillants de joie, les paroles de la Liturgie : « Réjouissez-vous avec moi, car j’ai engendré un Dieu et un homme ».

Mais, peu à peu, Jésus grandit. Il s’éloigne d’elle, la sèvre souvent de sa présence. Marie le laisse faire. On ne voit pas qu’à Capharnaüm elle ait insisté pour rencontrer son Fils, alors qu’elle était venue avec cette intention. Sans doute, avait-elle faim de le rencontrer plus purement encore dans la foi, mais sa sensibilité de femme, son cœur de mère, n’ont pas pu ne pas souffrir de telles séparations. Et que dire de sa peine au soir du Vendredi-saint, lorsqu’il lui fallut confier au sein de la terre le corps qu’elle avait porté dans son sein à elle ? C’est en vivant dans de telles circonstances son « Fiat » qu’elle achevait en elle l’œuvre du total dépouillement.

Et elle a fini son existence terrestre, exilée au milieu des hommes, pauvre de toute possession, mais riche de sa seule espérance, ensevelie dans le silence.


Le Silence de la Vierge

C’est le silence d’une âme contemplative qui se tient à l’écoute du Seigneur.

Dieu, qui est pour nous silence, agit au milieu de nous en silence. Ses grandes interventions dans le monde sont enveloppées d’obscurité. Telle est l’humilité de Celui qui s’efface parmi les hommes, au lieu de s’affirmer comme il le pourrait. Il n’est pas dans l’ouragan, ni dans l’éclair ou le tonnerre, mais dans la brise légère, au murmure imperceptible. Il se tait en agissant : « Et ego tacui ».vertus de Marie7

Les mystères de notre salut portent ce cachet de silence qui les a rendus, en leur temps, quasi inaperçus. L’Annonciation se passe peut-être dans le secret de la chambre de Marie, comme certains Pères se sont plu à l’imaginer. La Nativité a lieu en pleine nuit, à la campagne, « alors que le silence tient toutes choses ». Parlait-on beaucoup dans la maison de Nazareth ? On peut en douter. Chacun ne vivait-il pas, au-delà des mots et des images, de ce Dieu qui ne peut être dit par l’homme et qui ne lui demande que son silence pour s’exprimer en lui ?

L’âme de Marie, à l’école de celle de Jésus, a dû s’enfoncer toujours davantage dans le silence. On le devine en voyant combien ses paroles dans l’Evangile sont brèves. Pas un mot de trop : ce serait un vol fait à Dieu.

La suprême leçon que la Vierge recevra de Jésus, sera celle de la silencieuse Passion. Au moment où il opérait notre Rédemption, Jésus se taisait, nous disent les évangélistes : « Jesus tacebat ». Il avait, durant trois ans, parlé aux foules, semé le grain de la parole, mais ce grain ne pouvait plus germer que dans le silence. Quel contraste entre l’agitation démoniaque qui soulève le peuple à cette heure, « tumultus in populo », et le silence divin qui règne dans l’âme du Christ et de sa Mère. Tous deux savent maintenant que plus rien ne peut être dit par des mots : c’est leur souffrance qui exprime au Père les sentiments d’abandon et de confiance de leur âme et qui enseigne aux hommes le trop grand amour dont Dieu les poursuit.

De ce sommet de silence, il semble que la Vierge Marie ne soit jamais redescendue, s’ensevelissant au fond d’elle-même, dans la Foi et l’Amour.

Ce silence n’avait rien de farouche ni de contraint. Peut-être la Vierge a-t-elle exercé dans l’Eglise primitive une discrète influence auprès des Apôtres, leur rappelant à l’occasion telle ou telle parole de Jésus. Elle a certainement narré à l’Evangéliste ses souvenirs de l’enfance du Christ. La tradition rapporte qu’elle vécut avec saint Jean de longues années, méditant avec lui les grands thèmes du quatrième évangile. Mais c’est surtout par sa prière silencieuse qu’elle a été l’âme de l’Eglise naissante, le foyer secret où le grand Corps Mystique commençait à puiser, sans même s’en douter, sa chaleur vitale. « Pleine de grâce », au-delà de tout ce qu’elle pouvait comprendre ou exprimer, elle rayonnait la grâce et la vie.

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