Beaucoup d’âmes ne font pas d’apostolat parce qu’elles ne regardent l’apostolat qu’avec des « yeux d’hommes », c’est-à-dire les yeux du corps, comme si cette activité n’était qu’une activité purement humaine. Dans cette fausse perspective, on croit qu’il suffit de convaincre en parlant, en argumentant et en démontrant. On croit, implicitement, que la conversion n’est qu’une question de discours. On semble convaincu qu’il faut des qualités intellectuelles et oratoires et qu’elles suffisent par elles-mêmes. On s’imagine que c’est la connaissance qui compte et qu’il faut, en conséquence, du savoir, des arguments et des raisonnements contraignants. Tout cela n’est que naturalisme !
C’est oublier que l’apostolat est, avant tout, une œuvre surnaturelle, une œuvre de la grâce. Ceci est donc une manière de voir et d’agir qui mène soit à la présomption, soit au découragement.
La doctrine de la causalité instrumentale permet de sortir de cette erreur naturaliste. Si je suis un instrument dans les mains de la Vierge Marie, qui est la Médiatrice universelle de toutes les grâces, en général, et des grâces actuelles de conversions, en particulier, alors je vais pouvoir concourir à la production d’un « effet plus noble » que celui de ma pauvre action apostolique purement humaine et, donc, à un résultat surnaturel qui sera au-dessus de mes forces naturelles. Je serai l’instrument de l’Immaculée, et cela me permettra de « concourir à la production d’un effet qui est au-dessus de moi », c’est-à-dire la conversion de mon prochain.
Cette doctrine de la causalité instrumentale est bien consolante pour l’apostolat. Elle écarte toute présomption et prévient contre tout découragement. Elle met le Chevalier à sa vraie place et le maintient dans l’humilité.
Nous n’avons qu’une obligation de résultat que par rapport à ce qui nous est propre, par exemple : donner des Médailles ; l’Immaculée produira son effet propre : Elle se sert de notre action pour faire passer des grâces actuelles de conversions. En donnant la Médaille, nous aurons été ses instruments… Marie se sera servie de nous pour produire des effets qui nous dépassent. Elle-même étant l’instrument du SaintEsprit.
Cette doctrine rend humble : elle évite la présomption qui nous laisse croire presque insensiblement que nous convertissons les âmes par notre propre activité ; elle évite le découragement, surtout chez ceux qui sont moins doués ou qui n’ont pas le don de la parole. Elle remet le Chevalier à sa vraie place. Elle ôte aussi toute inquiétude : le résultat ne dépendant pas de nous, l’Immaculée ne nous impose pas une obligation de résultat surnaturel !
Abbé Guy Castelain+