Le saint abandon

Le saint abandon

Le temps nous manque, nos moyens sont faibles, nos capacités sont limitées. Tant mieux ! Ce sera pour notre Mère l’occasion de montrer que c’est Elle qui agit et qu’Elle est bien la « Vierge Puissante ».

76 rocz 057 850x480Nous vous proposons une lettre écrite du Sanatorium de Zakopane où le P. Kolbe, souffrant d’hémoptysies fréquentes, a été contraint de séjourner de juin 1920 à avril 1921. Ses supérieurs lui ont demandé de ne plus s’occuper de l’organisation de la Milice. Ces lignes montrent à quels prodiges d’apostolat un «simple membre isolé» de la Milice peut parvenir par le moyen de la Médaille miraculeuse.

Notons le grand esprit d’obéissance du Père Kolbe, condition première de tout succès, sa bonté rayonnante, sa prudence et son profond esprit surnaturel, qui n’oublie jamais la prière et surtout sa grande simplicité.

 

Au Frère Girolamo Biasi, Roma

Très cher Frère, 

J’écris très peu, car je suis malade et encore fiévreux. Je continue à rester dans l’hôpital comme aumônier et patient à la fois, et je devrai rester ici jusqu’à la fin du mois de mai (si la cure se passe bien). Avec tout cela, je me trouve très bien, parce que la vie des membres de la M.I. se réduit à se faire guider où, quand et comment cela plaît à la Maman. L’obéissance (donc la Maman) m’a envoyé ici, alors que pourrais-je désirer de mieux ?

De la M.I. je ne m’occupe plus; c’est-à-dire : je ne la dirige pas, parce que le Père Provincial m’a dit de laisser tout, donc aussi la direction de la M.I., et de m’appliquer à retrouver la santé, donc cela aussi, la Maman le veut. Maintenant, les choses de la M.I. en Pologne, c’est le Père M. Ceslao Kellar, définiteur de la Province, qui les tient en main.

Je me limite à l’action d’un membre de la M.I. et cela aussi avec modération. Je n’organise rien, seulement je prie et je fais prier les autres,et je parle un peu ; et ainsi un employé de l’État, qui depuis longtemps avait abandonné les sacrements et qui, après avoir reçu le livre d’apologétique à lire, l’avait mis de côté et feuilletait certains mauvais romans et disait : « Je suis un hérétique, pour moi, il faut des preuves claires», par l’intercession de Gemma (Sainte Germma Galgani, sainte très aimée par le Père Kolbe, morte en 1903 et canonisée le 2 mai 1940) j’ai recommandé cet homme à l’Immaculée pour qu’Elle prie le Sacré-Cœur pour lui. Ensuite, ayant reçu la Médaille miraculeuse, il la saisit soudain, contre toute attente, et se confessa. À Gemma j’avais promis la traduction de sa biographie en russe si ce monsieur se confessait, le jour même : il en fut ainsi.

Pas loin d’ici, il y a une maison de santé d’étudiants universitaires qui a la réputation d’irreligion. L’Immaculée m’a placé au milieu d’eux par le moyen d’une fourberie que j’ai faite, «sicut serpentes» : j’ai fait une série de discussions apologétiques, mais libres, de telle sorte que chacun pouvait dire son avis. (Une personne qui assistait à ces réunions en témoigne : «Et lorsqu’il venait diriger des débats, il le faisait de façon si spontanée, si attrayante, que tous les malades, même ceux qui avaient depuis longtemps abandonné toute pratique religieuse, ne pouvaient s’empêcher de l’aimer.») Le plus acharné des adversaires qui, réfuté, avait dit une fois : «La logique est un jeu de paroles», et une autre fois : «Je ne peux pas croire», après avoir échoué dans son argumentation empruntée à la philosophie de Schopenhauer (et il avait un autre livre à la main) a cédé à la grâce de Dieu par l’intermédiaire de l’Immaculée, de laquelle il avait reçu auparavant la Médaille miraculeuse. À l’émerveillement de ses collègues, il déclara publiquement qu’il voulait se confesser et tout de suite il le fit. Il m’a écrit maintenant (parce qu’il est rentré chez lui), et demande des prières. Priez vous aussi et faites prier pour lui.

Dans la même maison, j’ai eu le bonheur de baptiser un juif (étudiant d’université lui aussi) et je lui ai donné les derniers sacrements (il était très gravement malade). Le lendemain vint sa mère avec son frère et ils firent un grand vacarme, mais trop tard. À lui aussi, j’ai donné la Médaille. Par cela, j’ai excité la haine de presque tous les académiciens, et quand une des académiciennes a demandé au médecin de la maison de m’appeler (ou plutôt alors que j’étais déjà là) il lui a répondu qu’elle pouvait appeler les autres prêtres, mais pas lui, parce que celui-ci est un … missionnaire. Quelle belle faute n’est-ce-pas ? Quel bonheur ce serait de mourir pour un tel délit !

Quand les prisonniers bolchéviques étaient là (ils étaient 40), j’ai fait venir de Cracovie des livres d’apologétique (en russe) de la bibliothèque de la M.I. et je les leur ai prêtés en désignant l’un d’eux qui devait étre bibliothécaire. Plusieurs sont arrivés à la conviction que Jésus-Christ a fondé une Église, et l’un d’eux s’est persuadé que le chef de cette Église est le successeur de saint Pierre, le pape. Tous ont accepté les Médailles miraculeuses. Deux juifs aussi, qui étaient parmi les soldats polonais pour la garde, ont pris les médailles. Maintenant, tous sont partis. Ils disaient en russe : « Quand nous regarderons cette Médaille, nous nous souviendrons qu’un prêtre nous l’a donnée». Prions aussi pour eux et pour cette pauvre et misérable maison d’étudiants d’université, pour que le Sacré-Cœur, auquel elle a été consacrée par une dame qui y est, règne aussi en ce lieu. J’ai donné la Médaille aussi à une juive qui a promis de la garder avec honneur : quand elle me rencontre, alors elle me salue avec une profonde inclination de tête. En outre, je cherche à prêter des livres à des gens sans religion et à inciter les bons à la ferveur, par exemple par le moyen du Petit miroir des joies spirituelles, ou par quelques bonnes paroles. Voilà un peu d’action que la Maman Immaculée daigne faire par moi maintenant.

Quand je rencontre les ouvriers ou d’autres personnes, s’il est opportun, convenable et prudent, je m’arrête et nous parlons de l’insuffisance du socialisme, du caractère irrationnel des incrédules et du bonheur et de la vérité qu’on trouve dans la pratique de la religion et de la foi.

Voici un faisceau de nouvelles que vous pourrez communiquer aussi au frère Paul et à ceux qui veulent savoir comment pourrait travailler un membre de la M.I. même sans organisation…

J’aurais beaucoup à écrire mais je ne peux pas, parce que sinon la fièvre va monter. Prions, souffrons et travaillons pour l’amour de Jésus par les mains de l’Immaculée.

 

À bientôt au paradis.
Votre confrère très affectueux,
Maximilien M. Kolbe M.C. M.I.
Zakopane, 25.01.1921

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